Le commerçant de tissu

Dr Nesrine Choucri Mercredi 23 Mai 2018-14:47:59 Shéhérazade raconte
Le commerçant de tissu
Le commerçant de tissu

Shéhérazade raconte tous les soirs des histoires au roi. Des histoires qu'elle a regroupées du fond de l'Egypte, mais qui sont riches en morale. Aujourd'hui, elle raconte l'histoire du commerçant de tissu.

Il était une fois un commerçant de tissu. Un homme simple et modeste. Un homme au cœur d’or qui aimait son métier. En effet, chaque année, il passait 12 mois à fabriquer des mâts de navire. Puis, il prenait sa charrette et voyageait afin de transporter ses mâts vers le port et les vendre aux marins. Douze mois de travail acharné et ardu. Rien ne l’arrête. D’abord, il faisait son travail passionnément et en plus il gagnait un peu d’argent qui l’aidait à survivre et se nourrir.

Son capital était son tissu. Et les mâts de navire étaient vraiment sa raison de vivre. Sans les mâts, il ne pouvait pas imaginer sa vie. Comme d’habitude, le jour J est arrivé et il a décidé de se rendre aux ports pour vendre ses mâts.

A son arrivée, il a été choqué. Un autre commerçant était arrivé avant lui et avait vendu les mâts aux marins. Personne ne voulait de ses mâts. Triste, abattu, assommé, il ne savait plus que faire. Il venait de perdre son capital, sa fortune et son avenir.

Pire encore, nul ne s’apitoyer sur son sort. Nul ne lui montrait le moindre signe de compassion. Les marins ont commencé à faire de lui leur risée. « Regardez-le, il pleure comme une gamine. Il a perdu son argent. Il ne lui reste plus d’autres issues à part de demander l’aumône », disaient-ils. Des paroles acerbes et méchantes suivies de rires triomphants comme si le mal des uns faisait le bonheur  des autres.

Le commerçant était anéanti, mais il retenait ses larmes, il n’avait pas pris l’habitude de renoncer rapidement à ses rêves, ni à recevoir passivement les coups durs de la vie. Alors qu’il était en train de penser : « Que dois-je faire ? Comment est-ce que je peux surmonter ce problème ? », un marin passait en se moquant de lui : « Il ne te reste que tes mâts, tu devrais les manger ou encore en faire des vêtements pour te protéger contre le froid ».

Là, le jeune homme se dit : « pourquoi pas ? ! ». Une idée brillante lui vient en tête. « Je vais faire des pantalons pour les marins. Des pantalons plus résistants et aptes à supporter les difficultés du métier.

Le commerçant rentre chez lui et confectionne quelques-uns et revient le lendemain pour montrer ces spécimens aux marins. Il les vend sous un slogan : «Soyez un marin au pantalon résistant et indéchirable». Les marins commencent à affluer vers lui et achètent les pantalons. C’est vrai le tissu des mâts est plus résistant et peut supporter les longues heures de travail.

Le soir, il rentre chez lui et confectionne d’autres pantalons. Pendant qu’il travaille, il change le style des vêtements en y ajoutant des poches plus larges pour aider les marins. En revenant, les autres marins étaient à son attente et il leur vend les nouveaux pantalons aux grandes poches. D’autres voyageurs viennent découvrir les pantalons et souhaitent s’en acquérir.

Petit à petit, le commerçant de tissu se fait une grande réputation dans sa ville et devient le confectionneur des « pantalons de besogne ». C’est ainsi que les clients les ont appelés. Au lieu de travailler 12 mois pour vendre une seule fois, il travaille nuit et jour et vend à chaque lever de soleil. C’est ainsi qu’après douze mois de travail acharné, il parvient à s’acquérir un petit atelier devant le port.

Le commerçant de tissu devient alors le couturier le plus célèbre pour les marins et devient incontournable. Chaque nouveau marin doit d’abord s’acheter un «pantalon de besogne». C’est devenu comme un rituel, une cérémonie incontournable d’initiation.

Le commerçant de tissu n’a jamais oublié ce jour où il était assis sur le port sur le point de pleurer, cherchant à retenir ses larmes afin de préserver sa dignité.

Ce jour-là a changé sa vie. Il lui a ouvert grandement la porte du succès. Parfois, il ne faut pas sombrer dans la dépression, écoutant ceux qui se moquent de nous, leurs propos peuvent toujours être exploités dans le bon sens et pour la bonne cause.

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